Un retour aux méthodes de la Guerre froide
Emprisonnés en Slovénie en décembre 2022, Artem Dultsev et Anna Dultseva se faisaient passer pour un couple d’Argentins avant que leur double vie ne soit révélée. Leur libération en août 2024 illustre le climat de tensions et le renouveau de l’espionnage russe, qui atteint aujourd’hui des niveaux rappelant ceux de la Guerre froide. D’après le Verfassungsschutz, le service de renseignement intérieur allemand, l’activité d’espionnage russe en Europe est « comparable à celle de l’époque soviétique ». Depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022, la Russie s’appuie sur des agents infiltrés pour saper la stabilité européenne, une stratégie dont l’ampleur devient visible à travers une série d’incidents marquants.
Dates Importantes | Chiffres Clés |
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Décembre 2022 : Arrestation d’Artem Dultsev et Anna Dultseva en Slovénie, se faisant passer pour un couple argentin. | 230 000 $ : Montant estimé des pertes liées aux incendies et explosions suspectes dans des installations stratégiques en Europe en 2024. |
Mars 2024 : Incendie suspect dans un entrepôt londonien lié à des soupçons d’opération russe. | 30 % : Augmentation estimée des cyberattaques attribuées à la Russie sur des infrastructures européennes depuis 2022. |
Mai 2024 : Cyberattaques sur des institutions de l’UE, exacerbant les tensions diplomatiques. | 10 ans : Durée estimée de la résurgence de l’espionnage russe à un niveau comparable à la Guerre froide, selon Verfassungsschutz. |
21 mai 2024 : Publication d’un communiqué du Conseil européen pour renforcer la lutte contre les cyberattaques et les ingérences étrangères. | 50 % : Augmentation de la coordination entre les services de renseignement européens depuis 2023. |
1er août 2024 : Échange de prisonniers entre la Russie et la Slovénie, marquant le retour des deux espions à Moscou. |
En mars 2024, un entrepôt londonien a été ravagé par un incendie suspect, et en avril, une explosion dans une usine du groupe de défense britannique BAE Systems — fabricant d’armes pour l’Ukraine — a soulevé des soupçons d’opération de sabotage. Ce même mois, deux ressortissants germano-russes ont été arrêtés pour des projets de sabotage, accentuant la méfiance. Des suspicions de cyberattaques, notamment en mai 2024, ont encore confirmé l’escalade russe dans le domaine de l’espionnage et des cyberopérations.
Le niveau d’espionnage russe est aujourd’hui comparable à celui de la Guerre froide » – Verfassungsschutz
Une guerre de l’ombre entre Moscou et l’Europe
La rhétorique du Kremlin s’intensifie, Moscou affirmant qu’une « guerre contre l’Occident » est en cours et justifiant les opérations clandestines sur le sol européen. Kevin Riehle, spécialiste des renseignements à la Brunel University de Londres, estime que cette résurgence de l’espionnage correspond à une réplique aux récentes attaques ukrainiennes en Russie et à l’envoi d’armes occidentales à Kiev. Moscou considère désormais les bases militaires de l’Otan sur le territoire européen comme des « cibles légitimes », ouvrant la voie à des actions de déstabilisation « sous le seuil de l’escalade » pour éviter une confrontation militaire directe.
En parallèle, les responsables européens sont en alerte alors que les élections européennes de juin 2024 ont été marquées par des cyberattaques et des campagnes de désinformation, rappelant la vulnérabilité de l’UE aux ingérences étrangères. Le 21 mai 2024, le Conseil européen a publié un communiqué soulignant les mesures renforcées pour lutter contre ces interférences, y compris une surveillance accrue des réseaux sociaux et des campagnes de sensibilisation pour prévenir les manipulations.
Moscou cherche à déstabiliser l’Europe sans franchir le seuil de l’escalade militaire » – Mark Galeotti, directeur du cabinet Mayak Intelligence.
L’Europe face au défi de la sécurité intérieure
L’agressivité de la Russie sur le sol européen se traduit par une série d’opérations visant à nuire à la stabilité politique et à influencer les décisions stratégiques de l’UE. Les espions russes utilisent des méthodes sophistiquées pour contourner les mesures de sécurité et brouiller les pistes. En dépit de l’agressivité croissante, la stratégie de Moscou se veut subtile pour éviter des pertes humaines et maintenir ses actions dans une zone de flou, visant principalement à perturber et influencer sans franchir le seuil d’une véritable confrontation militaire.
Les capitales européennes, en état d’alerte, cherchent à renforcer leurs dispositifs de protection. L’UE a renforcé la coordination entre ses services de renseignements et accru les contrôles aux frontières pour identifier les agents infiltrés, mais la menace reste omniprésente, d’autant plus que les liens diplomatiques avec la Russie sont au plus bas depuis le début du conflit ukrainien.