Si dans le film, l’endroit n’est pas nommé, il est inspiré de lieux réels : les blanchisseries de la Madeleine. Avec une dizaine de succursales en Irlande, cette institution a retenu plus de 10 000 femmes entre 1922 et 1996.
C’est en 1993 que le scandale éclate en République d’Irlande. Un promoteur immobilier retrouve une centaine de cadavres dans le jardin de la propriété dublinoise qu’il vient d’acheter à des sœurs du couvent de la Madeleine . Ce fait divers a rapidement attiré l’attention publique et l’histoire de l’institution religieuse s’est progressivement dévoilée, notamment grâce aux témoignages des anciennes pensionnaires. En 1998, dans le documentaires Sex in a Cold Climate, quatre d’entre elles racontent les abus physiques, psychologiques ou sexuels qu’elles ont subis ainsi que les raisons absurdes de leur enfermement (certaines avaient eu des relations intimes hors mariage et d’autres étaient simplement jugées « trop jolies ») . Quant aux femmes ayant accouché au sein même de l’institution, leurs bébés leur étaient enlevés et supposément vendus à des familles américaines, rapporte Paris Match.
Le gouvernement irlandais a longtemps nié toute responsabilité dans cette affaire car ce couvent était une institution religieuse privée. Il a fallu attendre 2013 pour qu’un rapport démontre son implication. En effet, 26% des femmes et des filles mineures enfermées en ces lieux l’ont été à la suite d’une intervention des services de l’Etat.
De leurs côtés, les artistes n’ont pas attendu l’amendement du gouvernement pour dénoncer les violences commises dans les blanchisseries de la Madeleine. En 2002, le réalisateur écossais Peter Mullan remporte le Lion d’Or à Venise avec son film The Magdalene Sisters qui raconte l’histoire de trois femmes dans un de ces couvents. Puis, Claire Keegan écrit Small Things Like These devenu Tu ne mentiras point grâce à la caméra de Tim Mielants. Les films de Mullan et Mielants sont intéressants à mettre en regard pour comprendre le contexte socio-culturel qui entoure ce fait divers sordide. Quand le premier montre les jugements soi-disant moraux et l’oppression familiale qui mènent ces femmes à l’internement (elles le sont car leurs familles ont honte d’elles), le deuxième insiste sur le secret qui a entouré ces couvents, secret bien gardé grâce à l’emprise de l’église sur la population.