La « flotte fantôme » : une stratégie de contournement
Constituée d’un réseau de navires souvent vétustes et difficiles à tracer, la « flotte fantôme » russe est devenue un rouage essentiel dans le contournement des sanctions imposées par le G7, l’Union européenne et l’Australie. Ce réseau de pétroliers navigue à la limite de la légalité internationale et de la sécurité maritime, au mépris des réglementations et des risques écologiques. Selon une enquête du Le Monde, les navires de la flotte fantôme désactivent régulièrement leur système d’identification automatique (AIS), rendant leur position indétectable. Ce procédé, connu sous le nom de « dark activity », leur permet d’éviter les systèmes de surveillance et de contourner les embargos en dissimulant leur itinéraire et leur cargaison.
Dates Importantes | Chiffres Clés |
---|---|
Décembre 2022 : Mise en place d’un embargo occidental sur le pétrole russe, accompagné d’un plafonnement du prix à 60 dollars le baril. | 11,5 milliards $ : Revenus pétroliers de la Russie en avril 2024, doublant ceux de janvier 2024 malgré les sanctions. |
2023 : L’Inde devient le deuxième plus grand importateur mondial de pétrole russe. | 37 milliards $ : Valeur des importations indiennes de pétrole russe en 2023, treize fois plus qu’avant la guerre en Ukraine. |
Avril 2024 : Environ 70 navires de la « flotte fantôme » traversent chaque semaine la mer Baltique, transportant jusqu’à 100 000 tonnes chacun. | 75 $/baril : Prix du pétrole russe vendu sur le marché mondial, dépassant le plafond imposé par les sanctions occidentales. |
2024 : Des transferts en mer permettent de dissimuler l’origine russe du pétrole, facilitant sa vente sur les marchés internationaux. | 13 % : Part des exportations mondiales de pétrole russe traitées par l’Inde, devenant une plaque tournante majeure. |
Juillet 2024 : La Russie intensifie ses activités maritimes avec des équipements vétustes, aggravant les risques environnementaux. | 100 000 tonnes : Quantité moyenne de pétrole brut transportée par chaque navire de la flotte fantôme. |
Ces pétroliers furtifs agissent en haute mer, où ils transfèrent le pétrole russe vers des navires « officiels » sans que leur origine soit tracée. Une fois cette étape accomplie, le pétrole est ensuite acheminé vers divers pays et distribué sur le marché mondial. En avril 2024, les revenus pétroliers de la Russie ont ainsi atteint 11,5 milliards de dollars, soit deux fois plus qu’en début d’année, malgré les sanctions occidentales. Cette résilience du marché noir pétrolier illustre la capacité de Moscou à contourner les pressions économiques, tout en exploitant les failles de la réglementation maritime internationale.
L’usage de la flotte fantôme présente des conséquences directes sur l’environnement. En mer Baltique, environ 70 navires de ce réseau traversent les eaux chaque semaine, transportant chacun jusqu’à 100 000 tonnes de pétrole brut, avec des équipements souvent obsolètes et mal entretenus. Ces opérations clandestines exposent les écosystèmes marins à des risques de marée noire. Les pays riverains, inquiets des répercussions environnementales, ont renforcé leur vigilance, mais les moyens de traçage étant limités, les autorités restent impuissantes face à ces navires furtifs.
En avril 2024, environ 70 de ces navires traversaient la Baltique chaque semaine, transportant chacun jusqu’à 100 000 tonnes de pétrole brut.
L’Inde, plaque tournante du pétrole russe
L’Inde est l’un des principaux acteurs de cette reconfiguration du marché énergétique mondial. En un an, le pays est devenu le deuxième acheteur mondial de pétrole russe, transformant la situation en une opportunité stratégique pour stabiliser son propre marché de l’énergie. En 2023, l’Inde a importé pour 37 milliards de dollars de pétrole russe, soit treize fois plus qu’avant l’invasion de l’Ukraine. Ces importations, traitées et raffinées sur place, permettent ensuite au pays de revendre le pétrole transformé, y compris à des partenaires européens. Cette méthode permet aux États européens d’acheter indirectement du pétrole russe sans violer les sanctions, profitant à la fois aux besoins énergétiques de l’Inde et aux demandes de ses clients.
Le pétrole russe se vend à 75 dollars le baril, un prix bien supérieur au plafond de 60 dollars fixé par les sanctions occidentales.
Cette tactique avantageuse permet à l’Inde de réaliser d’importantes économies, estimées à plusieurs milliards de dollars, tout en maintenant une relative stabilité des prix de l’énergie domestique. En contrôlant les processus de raffinage et d’exportation, le pays se positionne en plaque tournante de l’énergie russe pour des marchés en quête de stabilité, notamment face aux incertitudes liées à l’offre mondiale. D’après l’agence Bloomberg, le baril de pétrole russe se vend désormais à 75 dollars, un prix largement supérieur au plafond de 60 dollars imposé par les sanctions du G7 et de l’Union européenne.